Elias Bishara

21 juin 2021Balagan de Alexandra Schwarzbrod Éditions Payot Rivages/Rivages Noirs

Écrit en 2003, Balagan, (Bordel en Hébreu mais aussi bizarrement en Polonais …), décrit avec justesse l’état des relations entre Israël et la Palestine après les premières Intifada.
Le récit repose sur l’opposition frontale entre deux flics, Elias Bishara, un Juif Arabe ou un Arabe Juif (en fait un Chrétien de Nazareth) et Roni Landau, un Israélien pur et dur dont la philosophie se résume à tous les Palestiniens sont des terroristes. le premier capable de sensibilité et d’empathie, est rejeté par sa communauté d’origine qui le considère comme un traitre mais aussi par ses collègues israéliens qui le voient comme un Arabe infiltré.
Les témoins de cette confrontation sont également des personnages emblématiques. 
David Bergame, un diplomate français en mission dans les territoires occupés pour évaluer les impacts des accords d’Oslo bénéficie d’une écoute attentive côté palestinien, la bronca de Chirac contre les services de sécurité israéliens n’est pas loin, mais suscite de la défiance côté Israélien.
Ken Klotz est un journaliste américain de CNN à la recherche du Scoop.
Salomon et Younes sont deux juifs orthodoxes membres de Zaka, des brigades chargés de nettoyer les scènes d’attentat et de reconstituer les corps des victimes afin de les honorer selon le rite de leur religion.
Le capitaine Sharon Elbaz, une jeune femme ambitieuse, officier actif de l’équipe de Roni Landau va se trouver confrontée à un choix entre Elias et Roni.
Lorsque une série d’attentats vise aussi bien la communauté juive que la communauté arabe. Roni Landau voit Hamas écrit en rouge dans son cerveau formaté. Bien que les pistes se referment au fur et à mesure qu’il avance, il n’en démord pas. Deux objectifs l’animent, prouver que le Hamas est à l’origine des attentats et écarter Elias Bishara de l’enquête.
Roni n’hésite pas à mettre les responsables du Hamas entre les mains de 
« (…) Druzes, qui étaient d’abord des Arabes, et que l’on disait bien plus cruel avec les Palestiniens que n’importe quel Juif israélien. »
Bishara mène sa propre enquête et contrairement à son collègue, en véritable investigateur, n’hésite pas à entendre et à confronter tous les points de vue, quelque soi leur émetteur.
Alexandra Schwartzbrod utilise sa connaissance du terrain et le travail d’investigation qu’elle y a mené pour plusieurs journaux et construit un scénario crédible dans lequel chacun des personnages figure une partie des groupes sociaux composant la société arabo-israélienne. Elle permet au lecteur d’appréhender les données d’un problème insoluble, notamment en montrant comment au-delà des postures politiques, l’économie israélienne ne peut se passer de ses travailleurs palestiniens souvent sur exploités « (Il) n’avait jamais pu s’habituer au spectacle des voitures rutilantes s’arrêtant sur le bord de la route pour embarquer quelques pauvres bougres, tels des bestiaux, vers un chantier à l’intérieur d’Israel. »
Grace à son style direct et sans fioritures, à la crédibilité des propos qu’elle prête à chaque acteur de son récit, l’auteure nous donne à lire une oeuvre qui nous éveille à un sujet dont nous ignorons souvent les composantes.
L’opposition entre Elias et Roni, est l’opposition éternelle entre ceux qui font confiance à la nature humaine et ceux qui la voient à travers le prisme de la Nation, avec comme corollaire, si tu n’appartiens pas à ma Nation tu es mon ennemi.
Air connu… 

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